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Pourquoi j'ai adhéré à l'UPR et pourquoi j'en suis ressorti ?


Jean Dugenêt, le 9 mai 2020

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Je vais expliquer successivement pourquoi j'ai adhéré à l'UPR et pourquoi j'ai décidé plus tard d'en sortir et de créer l'AGIMO, une nouvelle organisation politique. A travers ces explications ce sont des questions politiques de première importance que je compte aborder.

J'avais de profonds désaccords politiques avec François Asselineau avant d'adhérer à l'UPR. Rien d'étonnant à cela puisqu'il dit qu'il n'y a pas de clivage gauche/droite à l'UPR. Cela pose déjà un problème de vocabulaire car je ne connais pas le sens des mots "gauche" et "droite". Il parait que Ségolène Royal est de "gauche" et que Simone Veil était de "droite". Mitterrand était de "gauche" aussi, du moins certains le disent, et d'ailleurs Macron, qui est apparu sur la scène politique comme ministre de Hollande, est sans doute lui aussi de "gauche". J'avoue que j'ai du mal à suivre. Je vais tout de même utiliser un peu ces termes, pour faire comme tout le monde, mais je préfère parler de nationalistes, d'internationalistes et de patriotes. Je vous renvoie pour mes définitions à la page du site intitulée "internationalisme". Grosso-modo les nationalistes correspondent à ce que les journalistes appellent "l'extrême-droite", les internationalistes à ce que la presse appelle "la gauche" ou "l'extrême-gauche" et les patriotes à "la droite". L'amour de la patrie des patriotes les amène en effet souvent à défendre les exploiteurs de leur pays. Sauver le capitalisme dans leur pays est souvent, en effet, à leurs yeux la preuve de l'amour qu'ils lui portent.

Après ce préambule sur les questions de vocabulaire, je peux situer les divergences que j'avais avec François Asselineau au moment où j'ai adhéré à l'UPR. C'est un gaulliste, voire, peut être un gaulliste de gauche. Il se définit à ce titre comme un patriote et, à mes yeux, c'est un homme politique de "droite" foncièrement anti-communiste. Rappelons que De Gaulle était lui aussi un fervent anti-communiste puisqu'il s'était engagé très jeune pour lutter contre le bolchévisme en 1918 alors que la révolution russe venait d'avoir lieu et qu'elle était suivie dans toute l'Europe par de grands mouvements révolutionnaires qui trouvaient leur origine dans l'opposition à la guerre de 1914-18.

A l'opposé de cette position des gaullistes, et tout particulièrement de François Asselineau, je suis un internationaliste ce qui va de pair avec une forme de patriotisme (voir le discours de Jean Jaurès) mais je privilégie la solidarité entre les exploités du monde entier sans craindre pour cela de m'attaquer au capitalisme. L'espoir d'une construction du socialisme reste pour moi parfaitement réaliste. Il s'agit de construire une société sans exploiteurs et sans exploités. Ce n'est pas parce que les avancées qui ont été menées jusqu'à maintenant dans ce sens ont échoué et parfois abouti à des dictatures que cela est inéluctable. Il en va à ce sujet comme de la construction du capitalisme. Entre la révolution de 1789-93 et la réalisation avec la 3ème république d'un état "capitaliste démocratique", il aura fallu beaucoup d'échecs (2 empires, 2 restaurations, 2 formes de monarchie celle de droit divin et la monarchie constitutionnelle de Louis Philippe, la Commune de Paris). Cela fait beaucoup d'échecs avant la réalisation de ce qui correspondait à peu près aux idées des révolutionnaires de 1789. Je pense qu'il aura aussi fallu des échecs avant que le socialisme soit victorieux mais le capitalisme pourrissant nous mène tellement vers des catastrophes que nous sommes placés devant cette alternative : "socialisme ou barbarie". De longue date j'estime nécessaire pour cette perspective de rassembler une avant-garde du mouvement ouvrier car je ne vois aucune organisation qui puisse tenir ce rôle. Il me faudrait de longs développements pour l'expliquer. En quelques mots, j'estime qu'après que la révolution russe soit devenue, sous Staline, une infâme dictature c'est Trotsky qui a assuré pendant un temps la continuité du combat pour le socialisme mais je considère qu'il n'y a plus de trotskistes en France. Chez ceux qui se réclament du trostskisme on en voit qui votent pour Mélenchon d'autres pour Macron ; certains sont contre le Frexit, d'autres crachent sur les gilets-jaunes et, bien sûr, quelques-uns cumulent.

Quand  j'ai  adhéré  à  l'UPR,  c'était  donc  pour rassembler une avant-garde du mouvement ouvrier au sein de l'UPR.


C'était d'ailleurs le sous-titre de mon livre "De François Mitterrand à Jean-Luc Mélenchon". Je suis convaincu de longue date de l'absolue nécessité du Frexit et j'avais remarqué que François Asselineau menait à ce sujet un rôle pédagogique de premier plan. Puisqu'il proposait un rassemblement provisoire et sans clivages de militants qui veulent le Frexit, il me semblait que je pouvais agir ainsi sans problème au sein de l'UPR. Mon bilan à ce sujet est globalement positif puisque j'ai pu exprimer librement mon point de vue dans de nombreux articles sur Agora Vox et j'ai écrit deux livres qui donnent toute mon analyse de la situation française notamment sur la nécessité du Frexit. Je n'ai pas caché mes divergences avec François Asselineau et je l'en ai même informé en lui offrant mon livre sur Mélenchon. Je suis certain que je n'aurais jamais pu faire la même chose dans les autres organisations politiques car la plupart sont contre le Frexit et j'ai aussi des divergences avec les diverses autres organisations qui y sont favorables : le POI appellent à voter pour Mélenchon, le POID crache sur les gilets-jaunes, le PRCF cautionne les crimes de Staline. Les partisans de Mélenchon, que ce soit ceux de la FI ou d'autres qui votent pour lui, tirent à boulets rouges sur tout ce que j'écris. Il en est de même pour tous les "révolutionnaires de la phrase" et autres renégats du trotskisme qui défendent l'UE.

Il y avait cependant un malentendu dès le départ entre la politique de l'UPR et ma position à propos du CNR. L'UPR se réclame beaucoup du CNR. Certes il n'en est pas question explicitement dans la charte de l'UPR qui parle cependant d'un "programme de libération nationale". Il en est par contre question dans le programme pour les élections de 2017 comme dans de nombreux discours de François Asselineau. Il y est expliqué que le CNR n'a été possible que grâce à la personnalité du général de Gaulle et à une politique sans clivage gauche-droite. Par ailleurs, le site de l'UPR donne des détails sur ce qu'était le programme et la composition du CNR. J'en ai conclu que la politique de l'UPR était de rassembler un nouveau CNR. Je reconnais que cela n'est écrit nulle part et que ma conclusion était sans doute abusive. Il reste que j'ai toujours pensé qu'une organisation politique qui "brasse large" (i.e. sans clivage gauche-droite) ne sera jamais l'équivalent d'un cartel d'organisations comme l'était le CNR. J'ai toujours été persuadé qu'une telle organisation ne parviendrait jamais au pouvoir en France surtout par des moyens purement électoraux. Ce qui s'est fait en Angleterre est absolument impossible en France principalement parce que tous les médias sont verrouillés par des milliardaires hostiles au Frexit ce qui n'est pas le cas en Angleterre. On sait de plus comment sont verrouillés tous les grands partis qui sont unanimement opposés au Frexit alors qu'une bonne moitié de la population y est favorable. L'épisode de Michel Onfray changeant radicalement d'avis en une nuit montre aussi qu'une véritable terreur s'abat sur les intellectuels. Tous ceux qui se prononcent en faveur du Frexit se voient immédiatement couper l'accès aux médias de masse. Dans ces conditions François Asselineau ne passera jamais de 1% à 20% ni en 2022, ni en 2027, 2032... Dire le contraire c'est semer des illusions et j'ai plusieurs fois expliqué au sein de l'UPR que pour éviter les déceptions le mieux était, justement, de ne pas semer des illusions. Je propose donc pour ma part de construire un nouveau CNR avec cette stratégie:

"L'AGIMO propose de regrouper dans un nouveau CNR toutes les forces qui sont pour le Frexit. Nous savons qu'elles sont majoritaires puisque nous avons voté contre l'UE en 2005. Actuellement 7 organisations politiques se prononcent pour le Frexit : UPR, PRCF, ParDem, POI, POID, Patriotes, clubs "penser la France". Il faut les regrouper dans un nouveau CNR mais ce n'est pas suffisant. En particulier, il faut que les Gilets Jaunes cessent de tergiverser sur la question du Frexit sans lequel ils ne pourront jamais avoir le RIC en toute matière pour lequel ils se sont prononcés. Il ne leur resterait plus qu'un RIC applicable localement ce qui serait de peu d'intérêt. Ils peuvent même prendre l'initiative en lançant un appel dans ce sens. Le mouvement des Gilets Jaunes pourrait ainsi rebondir en entrant de plain pied dans le combat politique tout en restant apartisan. Il leur faudra pour cela surmonter

la puissante pression des européistes qui s'exprime assurément jusque dans leurs rangs. Il faudra d'ailleurs plus que la participation des Gilets Jaunes. Il ne faut pas se résigner à accepter que tous les militants des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier suivent les dirigeants actuels dans leurs misérables trahisons comme le vote du 19 mars 2020 à l'assemblée nationale."

Je me suis aperçu petit à petit que cette politique que je préconise était sans rapport avec la stratégie de l'UPR. Plus précisément, je me suis aperçu que si l'UPR parle beaucoup du CNR c'est seulement pour retenir l'idée qu'il ne faut pas de clivage gauche/droite mais cette idée ne s'applique que pour ouvrir les portes de l'UPR à un large public. L'UPR devient ainsi ce que j'appelle une "organisation qui brasse large". Je regrette par exemple que François Asselineau n'ait rien évoqué de ce genre quand il a organisé une fête pour le Brexit. Je regrette que le meeting organisé à Aix en Provence à l'automne 2012 par le M'PEP (actuellement ParDem) et auquel François Asselineau avait participé n'ait jamais eu de suite. Il s'intitulait : "Un nouveau CNR est-il possible et nécessaire ?" A ma connaissance, jamais François Asselineau n'a tenté ne serait-ce que de faire une déclaration commune avec d'autres organisations ou personnalités et, si malgré tout il a fait des démarches de ce genre, elles sont restées très discrètes.

J'ai donc trouvé nécessaire de proclamer l'AGIMO pour avancer avec la stratégie que je propose vers la constitution d'un nouveau CNR. Mais cela était aussi nécessaire pour appliquer la stratégie du FUO (Front Unique Ouvrier) que j'ai aussi défendue au sein de l'UPR sans la moindre chance de succès. Pour faire écho au mot d'ordre "Macron démission" ou "Macron destitution" je le prolonge concrètement en proposant un gouvernement provisoire PCF/PS/FI qui sera chargé de mettre en place le RIC et le Frexit puis de convoquer une assemblée constituante. Bien sûr, je sais que les dirigeants de ces trois partis sont hostiles au Frexit mais je propose néanmoins de leur demander de le mettre en oeuvre pour mobiliser les militants sur cette voie en sachant qu'au moins la moitié de la population y est favorable. C'est avec ces propositions que je pense regrouper une avant-garde du mouvement ouvrier tout en travaillant à la constitution d'un nouveau CNR.

Voilà ce qu'il en est de ma décision de proclamer l'AGIMO au moment où j'étais sollicité pour prendre ma quatrième adhésion à l'UPR. J'ai pensé un moment prendre cette adhésion tout en défendant la construction de l'AGIMO. Mais, quand "la crise de l'UPR" a éclaté j'ai jugé préférable de ne plus adhérer à l'UPR afin de ne pas tout mélanger.

Je déduis cependant de l'exposé que je viens de faire des conclusions sur la fragilité de l'UPR ce qui permet d'expliquer en grande partie la crise qui vient de surgir. Cette fragilité vient de la politique de l'UPR que je qualifie de bonapartiste. Il n'y a dans ce terme nulle injure. Ce qualificatif sert à désigner une démarche qui met en avant un homme providentiel (un Napoléon Bonaparte ou un Général de Gaulle) qui joue un rôle essentiel pour "sauver la France". On est dans ce type de démarche avec l'UPR qui cherche (à mon avis en vain) à faire élire François Asselineau à la tête du pays. Pour une politique bonapartiste on a un parti qui fonctionne sur un mode bonapartiste. Si le parti avait un mode de fonctionnement essentiellement démocratique tous les courants seraient représentés au Bureau National et il y aurait quelques communistes ou socialistes. Mais ce n'est pas ce type de fonctionnement qui est retenu pour l'UPR. Au congrès, les militants élisent en même temps le Président et le Bureau National qu'il a préalablement constitué. Ce bureau est homogène. Il est constitué de militants politiquement proches du Président. Le problème c'est qu'avec un mode de fonctionnement bonapartiste les cadres de l'UPR sont réduits à jouer un rôle d'instrument du Bonaparte et chez tous ces défenseurs du capitalisme cela risque fort d'heurter des égos fortement dimensionnés. Pour peu que le Bonaparte laisse apparaître une faille, ils risquent de s'y engouffrer... N'est-ce pas un peu ce qui vient de se produire ?

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